Fort National de Saint-Malo

Saint-Malo, la célèbre Cité Corsaire, est une ville qui n’a plus besoin de présentation. Son histoire, ses remparts imposants et ses plages immenses en font une destination emblématique de la Bretagne. Que vous arpentiez les fortifications qui surplombent l’océan ou que vous exploriez les ruelles de la vieille ville, tout à Saint-Malo évoque un passé glorieux et une beauté brute.

Mon propre souvenir de Saint-Malo est indissociable de ces promenades matinales sur les remparts. Mon père aimait nous emmener, mon frère et moi, pour de longues balades sur ces murs chargés d’histoire. On partait souvent très tôt, et je me souviens de nos réveils encore ensommeillés, bercés par le ronronnement de la voiture, pour ne retrouver pleinement nos esprits qu’à l’arrivée, face aux imposantes murailles de Saint-Malo. C’était la première chose que l’on voyait en descendant de la voiture, ces murs massifs, témoins d’un passé de batailles, et d’aventures maritimes.

Ces promenades nous paraissaient interminables, surtout pour nos petites jambes. Mon frère et moi avions toujours du mal à suivre le rythme de notre père, dont chaque pas nécessitait deux de notre part pour le rattraper. Mais ce qui nous motivait, bien plus que la perspective d’une vue imprenable sur l’océan, c’était sans doute les promesses de friandises. Nous lui réclamions des crêpes, des glaces, des bonbons – tout ce qui pouvait nous tenir éveillés et enjoués durant cette grande marche. Je pense maintenant que cela devait lui sembler épuisant, mais il ne montrait jamais la moindre impatience.

Ce qui comptait, bien plus que les douceurs sucrées, c’était ces moments partagés avec notre père sur les remparts. Nous lui posions des questions, souvent naïves, et il prenait le temps d’y répondre, tout en nous montrant les trésors cachés de la ville. Il y avait toujours ce moment inévitable où nous arrivions près des canons qui jalonnent les remparts. Et là, bien sûr, la séance photo s’imposait. Mon frère et moi grimpions, avec son aide, sur l’un des canons, nos visages illuminés de fierté. Et à chaque fois, presque par tradition, nous lui demandions : « Papa, on peut faire feu ? » Ce n’était qu’un jeu d’enfants, mais pour nous, c’était un véritable moment d’aventure.

Après la marche, il y avait la plage. Je ne suis jamais entré dans le Fort National de Saint-Malo, bien qu’il m’ait toujours intrigué, dressé là, face aux vagues. Peut-être ai-je déjà tenté de le visiter, mais aucun souvenir précis ne me revient. Ce qui m’est resté, en revanche, ce sont nos jeux sur le sable. Nous avions cette fascination pour les étoiles de mer, ces créatures mystérieuses que nous espérions trouver échouées sur le rivage à marée basse. Chaque fois, nous fouillions le sable avec enthousiasme, persuadés que nous en découvririons enfin une. Mais la réalité était souvent plus décevante. Nous ne trouvions rien, pas la moindre trace de ces créatures fantomatiques. Pourtant, cela ne diminuait en rien notre excitation. Il y avait dans cette quête un certain charme, un plaisir simple d’enfant, même si elle se terminait souvent par une petite frustration.

Saint-Malo, c’était donc ça pour nous : les remparts, les canons, les friandises, et cette plage infinie où nous cherchions des étoiles de mer comme des trésors enfouis. À travers les yeux d’un enfant, chaque coin de la ville avait quelque chose de magique. Je n’avais pas alors la pleine conscience de l’histoire qui imprégnait ces pierres, ni de l’importance de la ville en tant que bastion contre les invasions ou lieu de refuge pour les corsaires. Mais cela n’avait pas d’importance. Ce que je retiens surtout, ce sont ces moments passés avec mon père, main dans la main, à découvrir le monde sous son regard bienveillant.

Aujourd’hui encore, chaque fois que je retourne à Saint-Malo, je ressens une certaine nostalgie en arpentant ces mêmes remparts. Les souvenirs de ces promenades d’enfance me reviennent avec une netteté troublante. Ce que je n’ai peut-être pas compris à l’époque, mais que j’apprécie maintenant, c’est la valeur inestimable de ces instants simples, passés en famille, à se perdre dans la beauté d’un lieu chargé d’histoire. Si vous avez l’occasion de visiter Saint-Malo, je vous recommande vivement de prendre le temps de marcher sur les remparts, d’observer les vagues se briser contre les murs, et d’admirer les voiliers qui croisent au loin. C’est une expérience à la fois apaisante et inspirante, un peu comme revenir à une époque où les corsaires faisaient la loi sur ces mêmes eaux.

Et peut-être, qui sait, en fouillant le sable à marée basse, vous aurez plus de chance que moi et trouverez enfin cette étoile de mer insaisissable.